La petite Kabylie et la grande Kabylie
La Kabylie est une région montagneuse (entourée de plaines et par la mer) du nord de l’Algérie.
Son nom viendrait de l’arabe al-qabā’il , pluriel de al-qabīla, qui signifie « tribu », qui aurait donné le mot berbère lqbayel.
Ces confédérations de tribus déjà mentionnées dans l’antiquité sous un nom proche : Cabales réf. nécessaire. Actuellement ses habitants l’appellent « Tamurt n Leqvayel » (La terre des Kabyles).
Le poète se plaît à l’appeler « tamurt idurar », la terre des montagnes. Le pays des montagnes représente le Djurdjura occidental que les anciens appelaient « Aït Wadda « (Ceux d’en-bas) et le Djurdjura oriental qu’ils appelaient « Aït Oufella » (Ceux d’en-haut). La Kabylie possède une côte qui s’étend sur plusieurs centaines de kilomètres. Elle fait partie de l’Atlas et se situe donc en bordure de la Méditerranée qui lui fournit ce que l’on appelle « la corniche kabyle », située entre Bougie et Jijel, dans ce qui était appelé colonialement la « Petite Kabylie ».
Pour l’historien Ibn Khaldoun, elle représente la portion du territoire qui s’appelait la province de Bougie ; ce que les anciens kabyles appelaient Tamawya taqbaylit ou tamawya tout court, “fédération kabyle”.
Géographie
La Kabylie couvre plusieurs circonscriptions ou wilaya de l’Algérie : Tizi Ouzou et Béjaïa (Vgayet), la majeur partie de Bouira (Tubiret) et Bordj Bou Arreridj, et une partie des wilayas de Sétif, Boumerdes, Jijel et de M’Sila (Tamsilt). Suite à l’insurrection de 1871, la France coloniale décida de diviser cette province en deux : la Grande et la Petite Kabylie, également appelées Haute et Basse Kabylie.
Ces deux Kabylie faisaient partie de l’ancien département d’Alger pour la Grande et du département de Constantine pour la Petite Kabylie ; dont Bougie (Bgayet) reste la capitale kabyle depuis des temps immémoriaux, décrite par beaucoup d’historiens (Charles André Julien, Ibn Khaldoun, etc.) Les Kabyles l’appellent “Bgayet l-Lejdud” (Bougie des ancêtres). Tizi-Ouzou, appelé autrefois “le village” est d’apparition récente (depuis l’époque coloniale).
La Grande Kabylie va de Thenia jusqu’à Tigzirt. Elle représentait le territoire situé au nord du Djurdjura. Une petite portion de l’ancienne Province de Bougie. La Petite Kabylie se taillait s’étendait de Bouira en englobant le Djurdjura oriental, l’Akfadou jusqu’à Bougie et s’étendait d’Ouest en Est, et de la Méditerranée en passant par la vallée de la Soummam du Nord au Sud, soit plus de 500 km. Elle comprenait ainsi les confédérations des Bibans la et celle des Babors jusqu’a Collo.
Trois grands massifs montagneux occupent la plus grande partie de la région :
- Au Nord, la chaîne de la Kabylie maritime, culminant aux Aït Djennad (1278 m)
- Au Sud, le Djurdjura, dominant la vallée de la Soummam, culminant au Lalla-Khadîdja (2308 m)
- Entre les deux, le massif Agawa, le plus densément peuplé, avec 800 m d’altitude moyenne. C’est là où se trouve la plus grande ville de la Grande Kabylie, Tizi Ouzou. Larbaa Nath Irathen (anciennement « Fort-National »), qui compte 28 000 habitants en 2001, est le centre urbain le plus élevé de la région.
Population et langue
La région est très densément peuplée. La population de Kabylie est estimée à plus de 5 millions. Un nombre important de Kabyles vit dans le reste du pays et à l’étranger (France et Europe).
De langue kabyle, les Kabyles représentent le deuxième groupe berbérophone après les Chleuhs du Maroc.
Histoire
Moyen-Age
La dynastie Fatimide du Xe siècle est née en Petite Kabylie, avec le dai ismaélien Ubayd Allah al-Mahdi qui trouva un écho favorable à ses prêches millénaristes. Ceci conduisit les tribus berbères Kutama à conquérir l’Ifriqiya puis l’Égypte. Les Fatimides eurent moins d’intérêt pour le Maghreb après la conquête égyptienne. Ils le laissèrent sous contrôle des Zirides. Les Zirides se divisèrent entre les Hammadides (en Algérie) et les Zirides (en Tunisie). Leur règne influa sur la vie de la Kabylie et de l’Algérie, en rénovant Bougie (ville capitale après l’abandon de la Kalâa des Beni Hammad) et aussi Alger.
Conquête française
La région devient française progressivement à partir de 1857 et se soulève périodiquement, notamment en 1870 (« révolte des Mokrani »). La répression française se solde par de nombreuses arrestations, des déportations, notamment en Nouvelle Calédonie (voir Kabyles du Pacifique). La colonisation se traduit aussi par une accélération de l’émigration vers d’autres régions du pays et vers l’étranger. La France, à travers les ” bureaux arabes “, procède également à l’arabisation des noms de familles et de lieux en Kabylie. C’est ainsi qu’ Iwadiyen deviennent les Ouadhias, At Zmenzer devient Beni Zùenzer ou encore At Yahia en Ould Yahia.
Pendant la guerre d’indépendance, la Kabylie est la région la plus touchée du fait de l’importance des maquis et de la répression et de l’implication de ses habitants. Le FLN y a recruté plusieurs de ses chefs historiques parmi lesquels Abane Ramdane et Krim Belkacem.
Indépendance
La région s’est opposée à Alger à plusieurs reprises, d’abord en 1970 : le Front des forces socialistes de Hocine Aït Ahmed et de Yaha Abdelhafid conteste l’autorité du parti unique. En 1980, la Kabylie connaît plusieurs mois de manifestations réclamant l’officialisation de la langue berbère, appelées Printemps berbère circonscrit à la Kabylie et aux université d’Alger. Ce réveil culturel s’intensifie à l’occasion du durcissement de l’arabisation en Algérie dans les années 90. En 1994-1995, l’année scolaire fait l’objet d’un boycott appelé « grève du cartable ». En juin et juillet 1998, la région s’embrase à nouveau après l’assassinat du chanteur Matoub Lounès et à l’occasion de l’entrée en vigueur d’une loi généralisant l’usage de la langue arabe dans tous les domaines.
A partir d’avril 2001, de graves émeutes provoquées par l’assassinat d’un jeune par des gendarmes accentuent la rupture avec les autorités: c’est le Printemps noir. Une revendication autonomiste, qui était jusque-là le fait de quelques intellectuels, est désormais portée par le Mouvement pour l’autonomie de la Kabylie (MAK), dirigé par le chanteur Ferhat Mehenni.
Économie
L’économie traditionnelle de la région repose sur l’arboriculture : vergers, oliviers, ainsi que sur l’artisanat (orfèvrerie, tapisserie) ou encore poterie. L’agriculture de montagnes laisse peu à peu la place à une industrie locale (électroménager avec la société Sonalec). La kabylie fournit une grande partie de l’eau potable pour les régions qui sont à l’est et à l’ouest de celle-ci.